INTERVIEW - septembre 2000

 

au magasine "Ciné Live"

(A l'occasion du Festival de Deauville)

 

CINE LIVE : Comment résumeriez-vous "Space cowboys" ?

CLINT EASTWOOD : C'est la resurrection de quatre personnages pris pour de vieux schnocks ! Ils ont l'opportunité insespérée d'obtenir une seconde chance à l'automne de leur vie. Une occasion unique de faire leurs preuves, d'obtenir leur revanche, quarante ans plus tard, alors qu'ils s'étaient résignés. Le tout sur fond d'aventures et de suspens. Ce n'est pas un thème bien nouveau, mais c'est pour moi le moyen de rendre hommage à ces pionniers des années 50 qui avaient pris d'énormes risques en franchissant la barrière du son. Dans la réalité, comme dans le film, ils n'avaient pas eu la chance d'aller dans l'espace.

CINE LIVE : A Hollywood, la tendance est plus au film pour ados qu'au casting de sexagénaires...

CLINT EASTWOOD : Au début, on se moque des protagonistes, on plaisante sur leur âge, en effet. Mais, une fois qu'ils sont sur orbite dans l'espace, on peut oublier ce détail pour suivre leurs aventures car on s'est attaché à leur passé et à leurs personnalités. Je crois que le cinéma traverse une période où l'histoire n'a plus vraiment d'importance. Ce sont les gimmicks qui comptent. Moi, je fais partie de ceux pour qui l'histoirer reste un élément essentiel ! (Rires) C'est frustrant pour quelqu'un comme moi, qui a été nourri de films qui ne négligeaient pas cet aspect. Cela dit, il y a de la place pour toutes sortes de films. Mais le style MTV me laisse perplexe, tous ces montages très découpés... C'est comme si on refusait d'avoir la patience de savourer quoi que ce soit et que l'on voulait juste se goinfrer d'images.

CINE LIVE : On accuse votre personnage, Frank de ne pas avoir l'esprit d'équipe, un peu comme on vous a souvent reproché de ne pas partager l'affiche avec d'autres stars de même calibre...

CLINT EASTWOOD : On m'en a d'ailleurs fait la remarque récemment... Pourtant, j'ai eu Geraldine Page, Shirley McLaine, Gene Hackman pour partenaires. Je ne juge pas les acteurs en fonction de leur éventuel statut de star. Ce n'est pas ma mentalité. Je choisis ce que je considère comme étant les meilleurs pour un rôle donné. S'ils sont connus, tant mieux. autrement, ce n'est pas grave à partir du moment où les personnages leur correspondent.

CINE LIVE : Qu'est-ce qui vous a amené à choisir James Gardner, Tommy Lee Jones ou Donald Sutherland pour "Space cowboys" ?

CLINT EASTWOOD : Ensemble, ils forment une bande formidable et puis, question âge, ils restent crédibles puisque qu'il n'y a au maximum qu'une dizaine d'années d'écart entre eux. Je me suis dit qu'il serait intéressant de montrer ces acteurs, qui ont chacun une carrière bien remplie, se côtoyant. Malgré des styles et des méthodes différentes. Il n' y a aucune friction, ni problème particulier entre eux.

CINE LIVE : "Space Cowboys"comporte un peu plus de quatre cents plans ayant eu recours à des effets numériques ou spéciaux. Est-ce que cela a été contraignant pour un réalisateur de votre trempe ?

CLINT EASTWOOD : Oui, surtout lors de la préproduction. L'essentiel du travail préparatoire a été consacré à ce qu'il serait possible de faire sur le plan des effets spéciaux. Un an avant le début du tournage, j'ai consulté les spécialistes d'ILM afin de vérifier quelles séquences écrites dans le scénario seraianet visuellement faisables. Le film a été dessiné plan par plan au préalable puis, grâce à un système appelé Animatic, on a obtenu une sorte de dessin animé du film. Ce qui permet de se rendre compte de ce que cela pourra donner, mais surtout d'économiser sur le coût des effets spéciaux en supprimant à l'avance les plans inutiles.

CINE LIVE : Lors du flash-back qui ouvre "Space cowboys", on découvre votre personnage alors qu'il encore jeune pilote. A priori on croît vous reconnaître, alors qu'en fait, il s'agit d'un jeune acteur qui vous ressemble de manière frappante...

CLINT EASTWOOD : Il se trouve que Toby est le fils de Maggie Smith et de Robert Stephens (acteur britannique) et qu'il me ressemble au même âge. Je ne l'ai pas dirigé. Je crois qu'il avait vu pas mal de mes films ce qui lui a donné une certaine idée de mon comportement ! C'est amusant de voir comment quelqu'un vous perçoit, la manière dont il vous imagine. Je trouve qu'il s'en est plutôt bien sorti.

CINE LIVE : Comment avez-vous tourné les scènes où les astronautes sont en apesanteur ?

CLINT EASTWOOD : Tous les moyens, techniques et ficelles traditionnelles ont été utilisés, ce qui a représenté un vrai défi. La Nas nous a montré comment on se déplaçait à l'intérieur d'une capsule spatiale, en se tenant à tout ce qu'on peut. Des courroies sont disposées partout, ce qui permet de s'accrocher et de rester stable quand c'est nécessaire.

CINE LIVE : Vous avez composé le morceau "Espacio", qu'on entend au début du film...

CLINT EASTWOOD : J'avais envie de commencer le film avec un thème musical qui fasse croire que nous nous trouvions quelque part dans l'Ouest américain, qu'un cavalier allait surgir au milieu de cette vaste plaine... et prendre le spectateur au dépourvu !

CINE LIVE : "Space cowboys" est votre vingt-deuxième film en tant que réalisateur. Est-ce que la mise en scène est devenue plus facile au fur et à mesure ?

CLINT EASTWOOD : Je ne sais pas. Je crois en tout cas être plus patient qu'à mes débuts. A chaque nouveau film, je mets à profit ce que le tournage du précédent m'a apporté. Mais chaque film représente une expérience unique. Disons que ça devient plus facile avec l'âge, lorsqu'on est moins obsédé par sa carrière.

CINE LIVE : Quel plaisir éprouvez-vous en tant que metteur en scène ?

CLINT EASTWOOD : Celui d'assembler les pièces d'un puzzle, de m'impliquer dans le processus d'un film dans son entier. Chaque fois que je commence un nouveau film, je me fixe des objectifs inédits pour moi, qu'il s'agisse de la lumière ou de la manière dont je vais utiliser la caméra. Ce sont des choses auxquelles je réfléchis, sans pour autant aller les crier sur tout les toits.

CINE LIVE : Et le plaisir d'acteur, il a évolué depuis vos débuts ?

CLINT EASTWOOD : Non, il est resté le même. Peut-être etait-ce plus excitant il y a plus de vingt ans ? Je ne sais pas. Il m'est difficile de regarder en arrière. Je crois cependant que c'est plus amusant aujourd'hui : j'ai joué plus de rôles, je me connais mieux, j'en sais d'avantage sur les acteurs en général, leurs craintes, leurs mécanismes. Du moment que je ne fais pas toujours la même chose... N'oubliez pas que tout acteur vît dans la hantise que chaque rôle soit le dernier.

CINE LIVE : Qu'est-ce que l'espérimentation représente pour vous ?

CLINT EASTWOOD : Un véritable moyen de raconter une histoire. L'opportunité de m'exprimer de cette manière. Je m'estime très chanceux d'avoir pu faire carrière dans un métier qui m'a procuré tant de satisfactions aussi longtemps. Quarante, quarante-sept ans ? Je ne sais plus. Tant que j'aurai l'enthousiasme, je compte continuer. A l'heure qu'il est, c'est encore le cas. Mais si les projets qu'on me soumet n'étaient plus intéressants, ce serait une bonne raison d'arrêter.

CINE LIVE : A quand remonte votre envie de passer de l'autre côté de la caméra ?

CLINT EASTWOOD : Déjà très tôt dans ma carrière, je me suis intéressé à la mise en scène. J'ai eu la chance de tourner avec d'excellents réalisateurs comme Tay Garnett, Lazlo Benedeck, Ted Post et surtout Don Siegel. et d'autres, bien sûr. Chacun m'a enseigné quelque chose. J'ai appris même au contact des moins bons.

CINE LIVE : Vous êtes devenu célèbre aux Etats-Unis grâce au feuilleton "Rawhide", au début des années 60. Avez-vous réalisé l'un des cent dix-sept épisodes ?

CLINT EASTWOOD : Non, mais j'ai bien failli. Au moment d'obtenir le feu vert, un mémo a été envoyé par la direction de la chaîne, CBS, stipulant qu'aucun acteursous contrat n'était autorisé à passer de l'autre côté de la caméra. C'était à cause des dépassements de budget et des retards causés par la star d'un autre feuilleton de la chaîne "Frontier Circus"je crois. Ca leur avait servi de leçon, mais j'ai été très déçu de devoir renoncer au dernier moment.

CINE LIVE : La toute première fois a eu lieu quand ?

CLINT EASTWOOD : J'ai tout de même réalisé quelques bandes annonces pour "Rawhide" et puis, un documentaire de quinze minutes sur Don Siegel.

CINE LIVE : Comment avez-vous été amené à réaliser "Un frisson dans la nuit", votre premier long métrage ?

CLINT EASTWOOD : L'histoire avait été écrite par une amie à moi. Elle m'avait donné à lire un traitement d'une soixantaine de pages sur lesquelles, j'avais pris une option. Je me souviens d'avoir payé très bon marché, environ deux mille dollars. J'étais en Autriche, en traine de tourner "Quand les aigles attaquent", quand elle m'a annonçé avoir reçu une offre très intéressante de la Universal. avant d'accepter, elle voulait savoir ce que je comptais faire. elle avait vraiment besoin d'argent, et moi, je n'avais aucun moyen de faire aboutir ce projet. Je lui ai conseillé de vendre son scénario. Une fois rentré aux USa, j'ai signé un contrat avec la Universal, justement pour tourner "Sierra Torride" de Don Siegel. Un jour, je suis allé trouver Lew Wasserman, la patron du studio pour lui demander ce qu'il en était du script de "Un frisson dans la nuit".
Quelques jours plus tard, il m'a fait savoir que le projet était abandonné. Je lui ai dit que le projet m'intéressait quand même. Et quatre semaines après, le film était à moi ! J'ai dit à Don Siegel que je voulais aussi en assurer la mise en scène. Il a été très enthousiaste et s'est immédiatement porté volontaire pour obtenir ma carte syndicale de réalisateur. Je suis donc retourner voir Wasserman pour lui faire part de mes nouvelles intentions. Sans hésiter, il a dit oui, en me précisant que dans ce cas, le studio allait devoir m'établir un nouveau contrat. en clair, cela signifiait que je ne pourrais prétendre à un salaire de réalsiateur équivalent à ce que j'obtenais comme acteur. J'ai accepté malgré l'avis de mon agent. En 1970, c'était rare qu'un acteur soit aussi réalisateur. J'ai donc tourné "Un frisson dans la nuit" à Carmel et dans les environs, en cinq semaines. Le studio ne s'et mêmé de rien, rassuré par le fait que j'étais dans les temps et que je ne dépassais pas le budget alloué. On me laisssait tranquille mais en échange, je devais au studio le western ou le thriller de leur choix. J'ai fais moi-même le montage sans que la Universal prenne la peine de voir ce que cela pouvais donner. Le seul souci était de me faire tourner au plus vite d'autres films commerciaux.

CINE LIVE : Revenons encore en arrière. A l'époque de "Rawhide", vous faisiez des apparitions dans des films tels que "La revanche de la créature", "Tarantula"... Vous aviez un but précis à l'époque ?

CLINT EASTWOOD : J'essayais de faire mes preuves comme acteur ou, plus exactement, j'essayais de survuvre. Je savais que c'était un métier à risques, mais c'était ce que je voulais faire. Dans un coin de ma tête, j'étais convaincu qu'il y avait une place pour moi, quelque part dans ce métier. Quant à deviner où et quand, cela restait un mystère. Je ne me souviens pas avoir été travaillé par une ambition forcenée, j'espérais simplement bosser le plus souvent possible, faire des progrès, décrocher des rôles de plus en plus conséquents. A cette époque précise, je ne songeais absolument pas à la mise en scène.

CINE LIVE : Avez-vous passé beaucoup d'auditions ?

CLINT EASTWOOD : Pas tant que ça finalement. Et la plupart du temps, ça n'aboutissait à rien. Une poignée de mains dans un bureau et un signe de tête pour m'indiquer la sortie. Pourtant, à chaque fois que je passais une audition, je décrochais le rôle. Le problème était de parvenir à décrocher cette audition ! Je me rappelle qu'à la suite d'un d'un screen-test à la RKO, on m'avait offert un contrat de trois cents dollars par semaine, le double de ce que je gagnais alors. Manque de chance, le studio à ensuite été mis en faillite. J'ai donc végété, jusqu'à "Rawhide".

CINE LIVE : Et après ?

CLINT EASTWOOD : "Rawhide", c'était enfin l'assurance d'un emploi fixe et le soulagment de pouvoir gagner ma vie. Très vite, mon but a été d'utiliser ce rôle (Rowdy Yates) comme un moyen d'apprentissage, pour me perfectionner un peu plus chaque jour. L'un des avnatges d'une série télévisée, c'est que l'on peut corriger ses erreurs. Si, par exemple, je tentais autre chose de nouveau pendant une semaine et que je me rendais compte que ça ne donnait rien à l'écran, je rectifiais le tir en conséquence la semaine d'après.

CINE LIVE : Lorsque vous étiez sous contrat avec la Universal au début des années 70, avez-vous rencontré Alfred Hiotchcock, lui aussi sous contrta avec le studio ?

CLINT EASTWOOD : Oui, une seule foi. Il avait fait savoir qu'il souhaitait m'entretenir sur l'éventualité de faire un film avec lui. J'avais demandé à lire le scénario et on m'avait répondu de ne pas trop m'inquiéter à ce sujet : la santé de monsieur Hitchcock ne lui permettait sans doute pas de réaliser un autre film, mais il tenait absolument à me voir. Nous avons déjeuné et je l'ai écouté parler de cinéma et philosopher. Il avait bien aimé "Un frisson dans la nuit".

CINE LIVE : De tous les metteurs en scène, lesquels vous ont le plus influencé ?

CLINT EASTWOOD : JSans aucun doute Don Siegel et Sergio Leone (auxquels Eastwood a dédié "Impitoyable"). J'ai tourné plusieurs films avec chacun. Je dois aussi énormément à ceux dont j'admirais les films en grandissant : John Ford, Preston Sturges, Howard Hawks. Et puis, j'ai toujours eu un faible pour les westerns d'Anthony Mann.

CINE LIVE : Quels sont, selon vous, les films pivots de votre carrière ?

CLINT EASTWOOD : Pas obligatoirement ceux qui ont un gros succès. Bien sûr, les trois films que j'ai tourné avec Sergio Leone (Pour une poignée de dollars, Et pour quelques dollars de plus, Le bon, la brute et le truand). Et puis, "Les proies" de Don Siegel, qui a représenté une étape importante parce que ce film était un démarquage pour lui comme pour moi. Il y aussi eu "Un frisson dans la nuit", parce qu'il s'agissait là de mes débuts de metteurs en scène. "L'inspecteur Harry", à cause de son influence, a donné une nouvelle dimension au polar. Et aussi, pour la réplique "Make my day", qui restera comme l'une des plus fameuses. ensuite, "Breezy", le premier film que j'ai réalisé sans être aussi devant la caméra. "Bronco Billy" et "Honkytonk man" me tiennent particulièrement à coeur car ils montrent des héros d'un genre différent. "Bird" aussi est un film important. Et "Impitoyable" parce qu'on y voyait un personnage très complexe. Ca reste un film, une manière unique, une manière d'aborder le western sans chercher à jouer la carte de la nostalgie ou du romantisme. L'idée de démystifier ce genre, avec à la clé le message sous-jacent sur la non-violence.

CINE LIVE : Vous souvenez-vous de votre dernière rencontre avec Sergio Leone ?

CLINT EASTWOOD : Oui. C'était à Rome, alors que je faisais la promotion de "Bird". Il m'avait appelé à mon hotel pour déjeuner. Le repas a été très agréable, notre conversation baignat dans une sorte de nostalgie, à évoquer le début des années 60, qui nous semblait si loin... Je l'ai revu le même soir, lors d'une réception. il est mort quelques mois plus tard. Ces retrouvailles romaines, c'est un peu comme s'il avait tenu à me dire au adieu...

CINE LIVE : Vous avez la réputation de tourner très vite, de rarement faire plus de deux prises par plan et de ne jamais dépasser vos budgets.

CLINT EASTWOOD : Je ne suis pas certain que ce soit un avantage au sein d'une industrie qui vénère ses propres excès ! J'aime aller vite, ce qui me donne l'impression de progresser vers un but. Siegel disait souvent, en parlant de ceux qui filment une scène sous des tas d'angles différents que dans ce cas, n'importe qui peut se déclarer réalisateur. il avait raison. Je déteste filmer des plans dont je ne me servirai pas au montage final. Ca va à l'encontre de mes principes. Je préfère la spontanéité : trop répéter une scène ou chercher la perfection absolue finit par annihiler toute fraîcheur et aboutir à une sorte de stérilité. Je préfère l'inattendu, les petites erreurs, les maladresses, tout ce qui donne une impression de vérité, de vécu, d'authenticité. Les dialogues n'ont pas besoin d'être parfaits. Les gens ne s'expriment jamais de manière irréprochable. ils bafouillent, cherchent leurs mots. C'est ce que je cherche à encourager avec mes acteurs, Gene Hackman, Morgan Freeman ou John Malkovich n'ont pas jamias peur, eux de tâtonner, d'hésiter.

CINE LIVE : Quel regard portez-vous de manière générale, sur votre carrière ?

CLINT EASTWOOD : Disons... L'impression d'avoir survecu à tout le monde ! (Rires)

CINE LIVE : Mais encore ?

CLINT EASTWOOD : Je me suis toujours efforcé de trvailler à partir d'histoires solides ayant pour armature des scénarios dynamiques. Ceratins de mes films ont comporté leur dose de sexe et de violence. Mais en comparaison avec ce qu'on a peu voir aujourd'hui, "L'inspecteur Harry" paraît bien anodin. Je ne suis qu'un parmi d'autres. J'espère avoir diverti le public, fait rire quelques-uns. J'espère avoir attiré l'attention sur certains sujets et avoir provoqué la réflexion. Voilà c'est tout. Vous savez, le cinéma ne va pas résoudre les crises dans le monde ni la famine en Afrique. Contrairement à ce que certains aimeraient bien faire croire, le cinéma ne possède pas ce pouvoir.

CINE LIVE : Comment expliquez-vous que certaines stars de votre génération, Burt Reynolds ou Charles Bronson entre autres n'aient pas connu votre longévité à l'écran ?

CLINT EASTWOOD : JJe serais bien incapable devous formuler une thèse. Peut-être à cause des scénarios qu'ils ont choisis ? Il est impossible de répondre à ce genre de question. D'ailleurs, je me demande qui le pourrait, à part le public, peut-être...

CINE LIVE : Quels conseils donneriez-vous aux acteurs débutants ?

CLINT EASTWOOD : Quand je tentais de percer dans ce métier, alors que je suivais de cours d'art dramatique au Los Angeles City College, le premier acteur que j'ai rencontré téait Cornel Wilde. Lui ayant fait part de mon ambition, il m'avais simplement conseillé d'économiser mon ragent. Il s'en voulait d'avoir gaspillé le sien, ce qui l'avait forcé à accepter certains rôles merdiques qu'il regrettait. Je n'ai jamis oublié cette conversation. Ne pas brûler la chandelle par les deux bouts, c'est un moyen de protéger son indépendance, de pouvoir patienter en attendant mieux. A tous les débutants, je recommande aussi d'avoir l'esprit large, d'apprendre le plus possible. S'ils ont d'autres ambitions que d'être acteur, qui'ls n'hésitent pas à se lancer. Beaucoup n'ont qu'une envie : devenir célèbre. Ca ne suffit pas. Il faut vraiment avoir ce métier dans la peau, l'aimer par dessus tout pour être capable d'affronter les rejets auxquels personne, même ceux qui ont du succès, n'échappe à un moment ou un autre. Et puis, évidement, qu'ils soient solidement préparés pour être d'attaque lorsque, enfin, l'occasion se présente...

CINE LIVE : Parmi les jeunes acteurs contemporains, y en a t-il que vous trouvez prometteurs ?

CLINT EASTWOOD : Je ne sais pas. Existe -t-il parmi eux quelqu'un de la tremp de Bette Davis, capable d'avoir le même genre de carrière ? On se demande toujours ça en voyant tous ces jeunes en couverture des magazines. Il y en a tellement dont on n'entendra plus parler très vite. La véritable question est de savoir qui sera le prochain Steve McQueen...

CINE LIVE : Hollywood semble de plus en plus obsédé par les scores de ses films au box-office. Ressentez-vous la pression d'avoir à délivrer un produit qui rapporte ?

CLINT EASTWOOD : Dans "Chasseur blanc, coeur noir" mon personnage disait que pour faire un film, il faut oublier que quiconque ira le voir à la sortie. Cela résume, en gros ma philosophie sur la question du sucès au box-office. En étant d'abord concerné par les recettes, on devient omnubilé par l'idée de ce que le public attend de vous, comme si il y avait une recette relevant d'une science exacte... Moi, je suis à chaque fois surpris ! Parfois, les films qui marchent bien sont ceux auxquels vous croyiez le moins. Evidemment, si vous enchaînez échec sur échec, on finira par ne plus financer vos films. Mais je ne peux pas me permettre de penser aux réactions éventuelles du public quand je tourne un film, seulment à sa qualité, en faisant du mieux possible.

CINE LIVE : Imagineriez-vous reprendre le rôle de "L'inspecteur Harry" ?

CLINT EASTWOOD : JPour incarner son père cette fois ?! Si un scénario brillant se présentait à moi pourquoi pas ? Dirty Harry à la retraite... Que pourrait-il bien faire désormais ? Il faudrait vraiment trouver une idée très originale, dont l'impact puisse être aussi percutant que celui causé à l'époque. Mais je doute fort que cela rrive un jour !